Entrevue avec Carolina Carballo
Par Maéva Carreira
Date
Le mardi 22thseptembre 2020
Emplacement
Buenos Aires, Argentine
Éditrice
Maéva Carreira
Editor-in-chief
Tamy Emma Pepin
Comment plusieurs d’entre nous, les plans de Carolina Carballo ont été chamboulés en mars 2020. Celle qui avait un billet aller-simple pour Barcelone a dû annuler son déménagement en Espagne prévu en avril. Par contre, ce revirement de situation n’a pas empêché cette artiste visuelle multidisciplinaire basée à Buenos Aires de poursuivre son art. Plus que jamais, elle est inspirée par la puissance de la nature.
Originaire de la province de Córdoba, en Argentine, Carolina a grandi à la campagne, sur le verger familial où elle passait ses journées à jouer dehors avec ses deux frères. Intriguée par le monde qui l’entourait – toujours la première à lever sa main en classe! – elle a rapidement développé un intérêt prononcé pour les couleurs, les matériaux et les textures qu’elle retrouvait dans la nature. Sa curiosité insatiable venait de lui faire découvrir le pouvoir de l’art. Avec l’encouragement de ses deux parents artistes, Carolina a donc appris, dès un jeune âge, à développer son intuition artistique en exprimant par l’art ce qu’elle ne pouvait communiquer par des mots. Cependant, ce n’est qu’après avoir déménagé à Buenos Aires, quelques années plus tard, qu’elle ait pu définir son identité artistique.
Surnommée le Paris de l’Amérique du Sud, Buenos Aires est une ville sud-américaine dynamique, dotée d’une culture populaire unique et d’une influence italienne importante suite à une forte vague d’immigration européenne dans les années 1880. Cette diversité culturelle propre à Buenos Aires a permis à la ville de développer une identité culturelle singulière, qui s’est rapidement traduite par l’émergence d’une importante communauté artistique et culturelle. Aujourd’hui, chaque quartier possède son propre Centro cultural, soit un centre géré par des coopératives et où les porteños sont invités à assister à des expositions d’art, des prestations musicales, des soirées de poésie et des représentations de théâtre.
Cette diversité culturelle effervescente de Buenos Aires se reflète également dans le système d’éducation publique. Lors de ses études à l’Universidad de Buenos Aires, Carolina a eu la chance de côtoyer des artistes et des étudiants de divers horizons qui lui ont permis de s’initier à de nouveaux points de vue et idées artistiques.
Il ne fait aucun doute que pour Carolina, cet environnement multiculturel au sein duquel elle a pu évoluer ait été un élément clé dans son processus d’apprentissage et dans la définition de son identité artistique.
Il est drôle de penser que même si la médecine, la biologie et les sciences étaient des domaines qui l’intéressaient, elle ait décidé de suivre son instinct en s’inscrivant en graphisme et en histoire de l’art.
D’ailleurs, pendant ses études, Carolina a fait son entrée sur le marché du travail en débutant sa carrière dans l’industrie de l’animation graphique. « Avec la technologie, les temps changent rapidement, et comme la photographie et le cinéma ont su transformer les paradigmes de l’art, je pense que les arts informatiques auront le même impact, mais cette fois-ci à un rythme beaucoup plus effréné ».
Aujourd’hui, Carolina est une artiste et directrice artistique reconnue pour sa technique numérique 3D qui met en scène des environnements et des univers surréalistes qu’elle crée grâce à une sélection intuitive de couleurs, de matériaux et de textures. Inspirée par le mouvement Bauhaus dont la philosophie enseigne le design comme une solution à nos maux de société, Carolina s’intéresse non seulement à l’esthétique des matériaux représentés dans son art, mais aussi à leur fonctionnalité. Ses visuels néo-réalistes visent à utiliser le pouvoir de la couleur pour remettre en question la relation des matériaux durables dans les univers graphiques qu’elle crée en s’inspirant de la nature.
La technique 3D de Carolina et son approche personnelle de l’environnement et de la nature l’ont amenée à collaborer avec divers artistes et organisations dont des nouveaux médias comme Taupe – une plateforme de recherche en ligne qui relie la théorie de la couleur à l’art numérique par le biais de la littérature. Dans le cadre de cette collaboration, Carolina a été invitée à réfléchir sur comment les propriétés du verre, comme matériau, influencent notre perception de la réalité. Grâce à sa technique numérique, Carolina a su créer un futur dystopique illustrant un environnement rempli de verre traité utilisé pour la confection de nos écrans et laissé par terre par les humains. She wanted her images to question the glass’ relation and interaction with a new and unknown environment.
Visuels créés par Carolina Carballo pour ORB
En tant que collaboratrice visuelle pour ORB, Carolina a aussi été appelée à se pencher sur sur la relation entre la matérialité et le thème éditorial Reshaping. Comme plusieurs d’entre nous, Carolina souhaite faire les choses différemment dans l’espoir de bâtir un monde meilleur, plus prolifique et durable.« Pour les visuels, j’ai établi une relation entre ce concept et l’utilisation du verre. On peut penser au verre comme un élément qui brouille la vue ou la transforme afin de permettre aux choses devant nous d’être plus claire . »
La curiosité est ce qui pousse Carolina à chercher de l’inspiration pour la création des environnements de ses visuels. Nina Simone disait, « an artist’s duty, as far as I’m concerned, is to reflect the times. » Aujourd’hui, plus que jamais, tout peut être un élément déclencheur pour un nouveau projet. Avec le confinement, Carolina trouve son inspiration dans les choses simples que la vie a à offrir – les feuilles, les plantes, les pierres, etc. En ces temps difficiles, elle ressent le besoin de réfléchir à l’impact de notre consommation et de notre mode de vie sur la nature. Car, comme elle a su l’exprimer, « nous ne contrôlons peut-être pas notre environnement, mais nous pouvons l’influencer. » Et une chose est sûre, les univers graphiques de ses visuels inspirés par la nature ont effectivement le pouvoir de nous faire réfléchir sur l’utilité des matériaux que nous utilisons.
CAROLINA CARBALLO
@_CAROLINA.CARBALLO_
WWW.CAROLINA-CARBALLO.COM